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Togo : le CPC rejette la demande de report des municipales et accuse l’opposition de manœuvres politiques
À quelques jours des élections municipales prévues pour le 17 juillet 2025, le Cadre Permanent de Concertation (CPC) a tranché : aucun report ne sera envisagé. Cette décision a été prise lors de la 22ᵉ session de l’organe, tenue lundi à Lomé, alors que plusieurs partis politiques de l’opposition, appuyés par des mouvements citoyens, avaient appelé à un ajournement du scrutin, dénonçant un climat de répression et un déficit de légitimité démocratique.

Dans une déclaration ferme, le président du CPC, Mohammed Tchassona Traoré, a qualifié la requête de report d’« irresponsable » et de pure « récupération politique », accusant ses auteurs de jouer avec les institutions.
L’argument de la cohérence institutionnelle
Mohammed Tchassona Traoré n’a pas mâché ses mots. Selon lui, les formations politiques qui exigent aujourd’hui le report sont les mêmes qui ont participé aux travaux préparatoires du scrutin, validé le calendrier électoral, touché les financements publics, et déposé des listes de candidatures dans plusieurs circonscriptions. « S’ils ne veulent plus aller aux élections, qu’ils restituent les fonds reçus », a-t-il lancé, dénonçant une tentative de décrédibiliser un processus pourtant engagé de manière consensuelle.
Pour le président du CPC, il n’est plus question de revenir en arrière. Les délais légaux ont été respectés, les préparatifs logistiques sont finalisés, et le corps électoral a été convoqué. Dans ce contexte, céder aux appels au boycott ou au report reviendrait à compromettre la crédibilité de l’agenda électoral national et à créer un précédent dangereux pour la stabilité des institutions.
Des tensions croissantes dans un climat sécuritaire tendu
Ce refus intervient pourtant dans un climat sociopolitique explosif. Depuis le mois de juin, plusieurs manifestations ont été violemment réprimées à Lomé et dans d’autres villes du pays. Le Mouvement du 6 Juin (M66), composé de jeunes activistes, blogueurs et artistes, a dénoncé une atmosphère de terreur étatique et a appelé à une mobilisation nationale les 16 et 17 juillet, jours de vote.
Des organisations de défense des droits humains ont documenté des arrestations arbitraires, des disparitions forcées, et même des morts dans le cadre de la contestation contre le régime de Faure Gnassingbé. Pour ces acteurs, organiser des élections dans ce contexte relève de la provocation.
Face à cette situation, la Dynamique pour la Majorité du Peuple (DMP), coalition regroupant plusieurs partis d’opposition, a récemment annoncé son retrait du CPC, dénonçant une « mascarade de dialogue » et appelant à un report sine die du scrutin.

Une polarisation politique inquiétante
En fermant la porte à tout report, le CPC s’aligne clairement sur la ligne dure du pouvoir en place, et accroît les tensions politiques. L’opposition dénonce un processus électoral biaisé, marqué par le contrôle de la CENI par des personnalités proches du pouvoir, l’impossibilité d’organiser des campagnes en toute liberté, et l’absence d’une véritable concertation pluraliste.
Le refus du report est aussi un signal envoyé à la communauté internationale, dans un contexte où l’image du Togo sur le plan des droits démocratiques est de plus en plus fragilisée. Le pays est le dernier de la sous-région ouest-africaine à vivre sous une forme de monarchie électorale, avec une réforme constitutionnelle controversée qui a récemment permis à Faure Gnassingbé de se maintenir au sommet de l’État en tant que président du Conseil, sans passer par un vote populaire.
L’impasse démocratique se confirme
La posture actuelle du CPC pourrait contribuer à radicaliser une frange de l’opposition et de la jeunesse, qui estime que le processus électoral est vidé de toute légitimité. Le refus du dialogue, le mépris des revendications populaires, et la stratégie sécuritaire adoptée face à la contestation, laissent peu de place à une sortie pacifique de crise.
Reste à savoir si le scrutin du 17 juillet pourra réellement se tenir dans des conditions acceptables, et surtout, s’il sera reconnu comme légitime par les populations locales et les observateurs internationaux. Dans un pays où le rapport de force semble primer sur le droit, le fossé entre institutions officielles et société civile ne cesse de se creuser.
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